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Quel est ce gros oiseau bossu avec des pattes d’alien ? Tout noir, un front blanc… plouf !

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Corneille ou corbeau ?

 

On voit souvent des groupes de grands oiseaux noirs en ville, sur la pelouse d’un parc ou perchés sur un immeuble, qu’on appelle facilement des corbeaux. Sauf qu’en réalité, les corbeaux sont rares en ville, et qu’on a la plupart du temps affaire à des corneilles !

Les deux espèces qu’on peut voir en ville sont la Corneille noire et le Corbeau freux. Mais alors, comment les différencier ?

 

© J. Coatmeur

© J. Coatmeur / LPO-IDF

 

Ordre : Passériformes
Famille : Corvidés
Genre : Corvus
Espèce : Corvus corone

  © T. Riabi

© T. Riabi / LPO-IDF

 

Ordre : Passériformes
Famille : Corvidés
Genre : Corvus
Espèce : Corvus frugilegus

 

On peut d’abord les distinguer par leur morphologie.

Un gros oiseau noir au long bec… Oui mais lequel ?

Les deux espèces se ressemblent : oiseaux noirs au long bec pointu, d’une cinquantaine de centimètres de long, et d’un tout petit mètre d’envergure. Mais on peut quand même les distinguer grâce à quelques critères déterminants. Le plus évident tient à ce que le Corbeau freux n’a pas de plumes à la base du bec : on voit nettement une zone nue gris clair autour du bec, alors qu’au contraire, chez la Corneille noire, les plumes recouvrent la base du bec.

Mais il y a un piège : le Corbeau freux juvénile n’a pas encore le bec dégarni. D’autres indices permettent alors de le distinguer de la corneille noire :

  • le bec de la Corneille noire est arqué, alors que celui du Corbeau freux est nettement plus droit et pointu,
  • la calotte du Corbeau freux est plus pointue que celle de la Corneille noire,
  • le plumage de la corneille a des reflets bleu-vert, alors que celui du corbeau a des reflets d’un violet rougeâtre.

© F.Desbordes   © F.Desbordes

Corbeau freux Corvus frugilegus à gauche et Corneille noire Corvus corone à droite. © Dessins de François Desbordes.

Corbeau des champs, corneille des villes

Les deux espèces sont présentes en partie dans les mêmes milieux : on les trouve dans les zones boisées, dans les plaines agricoles, et parfois en ville. Cependant, elles n’ont pas tout à fait les mêmes goûts.

Quand on est dans une grande ville en Ile-de-France, on peut supposer sans trop de risque qu’on a affaire à une Corneille noire : il n’y a, pour ainsi dire, pas de Corbeaux freux à Paris, et très peu en petite couronne. Celui-ci préfère nettement les milieux ruraux, alors que la Corneille noire, plus opportuniste, s’accommode bien de la vie en ville.

Un amour de corvidé

Corbeaux et corneilles vivent en couples monogames pendant des années, parfois toute une vie. Même en hiver, quand les corbeaux freux se rassemblent en grandes bandes pour rechercher leur nourriture, et en dortoirs de plusieurs milliers d’individus, la femelle et le mâle restent proches l’un de l’autre pour se nourrir et pour dormir.

Les deux espèces nichent au sommet de grands arbres feuillus, et construisent leurs nids à deux au début du printemps. Ils ne s’y prennent cependant pas tout à fait de la même façon. D’abord, les corbeaux freux nichent en colonies d’une cinquantaine de couples en moyenne, avec plusieurs nids par arbre, alors que les couples de corneilles noires s’isolent : on trouve une quinzaine de nids par hectare au maximum. Les corneilles noires n’hésitent d’ailleurs pas à manger les oeufs et les oisillons de leurs voisins qu’elles jugent trop proches. Les deux espèces pondent 3 à 5 oeufs verts ou bleu clair, les corbeaux en mars et les corneilles en avril-mai.

© Corbeau freux

Corbeaux freux, © J. Coatmeur

Les corbeaux freux nichent dans des groupes d’arbres dans des milieux ouverts. On les trouve souvent dans les peupliers des vallées fluviales, mais aussi dans les grands parcs, en bord de route, etc. Les corneilles sont moins exigeantes, on les trouve en haut des arbres sur des falaises, parfois en haut de poteaux.

Voyageurs, mais pas trop

Les corbeaux freux sont des oiseaux assez grégaires. Ils passent l’automne et l’hiver en bandes de plusieurs milliers, voire dizaines de milliers d’individus, et ils nichent en groupes. En hiver, ils peuvent parcourir de grandes distances dans les campagnes pour trouver de la nourriture. La vie en grands groupes leur permet alors d’échanger des informations à propos des sources de nourriture. Ils passent ensuite la nuit en dortoirs dans des arbres hauts ou, s’ils n’en trouvent pas suffisamment, en ville.

Les corneilles noires, elles, peuvent passer l’année entière en couples isolées. Cependant, les jeunes de l’année et les oiseaux qui n’ont pas trouvé de territoires se regroupent en bandes, et sont parfois rejoints par les couples pour dormir en hiver. Ce sont ces groupes sans territoires qu’on voit beaucoup en ville et autour des décharges.

Corneilles et corbeaux sont omnivores : ils se nourrissent surtout de végétaux (céréales, racines, fruits, glands, graines), mais aussi d’insectes et de vers, et parfois de charogne. Ce régime riche en graines et en fruits, et la tendance de ces espèces à se nourrir en grands groupes, peut occasionner des dégâts sur les champs et les vergers, et contribue à la mauvaise réputation de ces oiseaux. Pourtant, ils se rendent également très utiles, en mangeant des ravageurs (insectes et campagnols) et les charognes qui pourraient contaminer les cultures.

Bien sûr, en ville, ils piochent dans les déchets humains. Ceux-ci n’étant pas une source d’alimentation particulièrement équilibrée, on observe régulièrement en ville des corneilles noires ayant un plumage partiellement blanc, qui semble lié à des carences nutritionnelles.

Comme tous les corvidés, ces deux espèces stockent leur nourriture, en enterrant le surplus. Ils peuvent parcourir plusieurs kilomètres pour cacher ces stocks sans être vus par leurs congénères, et peuvent même retourner les déterrer et les déplacer vers une meilleure cachette si un congénère les a observé… On a aussi observé des corneilles voler des carcasses enterrées par des chiens dès que ceux-ci avaient le dos tourné !

© Lea Schlemmer

© Corbeau freux & Corneille noire - Dessin de Léa Schlemmer

Effectifs, tendances et statut
Monde (IUCN monde)

La Corneille noire est présente seulement en Europe de l’Ouest, de la Grande-Bretagne jusqu’à l’Allemagne, et du Danemark jusqu’à la moitié nord de la péninsule ibérique. En Italie, en Europe de l’Est et en Asie, elle est remplacée par une espèce très proche, la Corneille mantelée. Celle-ci se reconnaît à son plumage bicolore, au corps gris. La population des corneilles noires est stable et importante : entre 9 et 17 millions de couples en Europe (2015). L’UICN lui a donc attribué le statut de « préoccupation mineure » (Least Concern).

Le Corbeau freux est présent dans les zones tempérées de l’Eurasie. On le trouve du Portugal à la Russie. On trouve des populations sédentaires principalement dans les îles britanniques, en France, en Europe de l’Est jusqu’à la frontière russe et jusqu’en Turquie, ainsi qu’en Ouzbékistan et au Kirghizstan. Des populations importantes nichent dans le quart sud-ouest de la Russie et hibernent dans toute l’Europe et au Proche-Orient. Cette espèce reste rare en Scandinavie, dans la péninsule ibérique, et en Italie. Il existe une seconde sous-espèce du Corbeau freux en Asie, du sud de la Chine au nord-est de la Russie. La population européenne du Corbeau freux est en déclin. L’UICN lui a cependant attribué le statut de « préoccupation mineure » (Least Concern) à l’échelle mondiale, les effectifs restant importants : 8 à 15 millions de couples en Europe (2015).

En France (Atlas des oiseaux de France métro...)

La Corneille noire est présente partout en France, surtout dans les milieux ouverts (plaines agricoles, landes, etc.), mais elle est aussi fortement présente dans les milieux urbains. Elle est un peu moins fréquente dans le quart Sud-Est de la France, en particulier dans les Alpes. On estime le nombre de couples de corneilles noires en France entre 1 et 3 millions.

Le Corbeau freux est présent toute l’année au nord d’une ligne allant de Bordeaux à Grenoble. Il est cependant absent de certaines régions, notamment une partie de la Bretagne, et les zones montagneuses. Les populations d’Europe de l’Est et de Russie hivernent en France jusqu’aux Pyrénées, mais restent absentes des façades atlantique et méditerranéenne, et des zones de haute montagne. Il est nettement moins abondant que la Corneille noire : on compte entre 250 000 et 300 000 couples en France.

En Ile-de-France (Atlas des oiseaux d’IDF)

La Corneille noire tire parti de tous les milieux, et on la trouve donc partout en Ile-de-France, des massifs forestiers aux centres-villes. On estime sa population entre 50 000 et 100 000 couples.

© Répartition

Carte de nidification de la Corneille noire (Corvus corone) en Île-de-France (issue de l’Atlas des oiseaux nicheurs d’Ile-de-France, 2009-2014).
En rouge les nicheurs certains, en orange les nicheurs probables. Les cercles concentriques donnent une idée des effectifs nicheurs par maille du quadrillage : de 1 à 10 couples pour les petits cercles, de 11 à 100 pour les plus grands cercles, des losanges lorsqu’il n’y a pas eu de dénombrement.

Le Corbeau freux niche surtout à la campagne, on en trouve dans la plupart de l’Ile-de-France mais il est absent de Paris intra-muros, et il n’y a que deux colonies dans la petite couronne. On compte entre 3500 et 5000 couples en Ile-de-France (2014).

© Répartition

Carte de nidification du corbeau freux (Corvus frugilegus) en Île-de-France (issue de l’Atlas des oiseaux nicheurs d’Ile-de-France, 2009-2014).
En rouge les nicheurs certains, en orange les nicheurs probables. Les cercles concentriques donnent une idée des effectifs nicheurs par maille du quadrillage : de 1 à 10 couples pour les petits cercles, de 11 à 100 pour les plus grands cercles, des losanges lorsqu’il n’y a pas eu de dénombrement.

Le saviez-vous ?

Les corvidés sont connus et étudiés pour leurs capacités étonnantes. Ils peuvent notamment fabriquer des outils, se reconnaître dans un miroir, et imaginer ce que pensent leurs congénères.

Bibliographie

Ouvrages

  • Paul Géroudet, Limicoles, gangas et pigeons d'Europe', Delachaux et Niestlé, 1983, pp. 569-581
  • Atlas des oiseaux nicheur d’Ile-de-France, 2009-2014, CORIF. Corbeau freux Corvus frugilegus et Corneille noire Corvus corone. 203 pages.
  • Le Maréchal P., Laloi D. et Lesaffre G. (2013). Les oiseaux d’Île-de-France. Nidification, migration, hivernage. CORIF-Delachaux et Niestlé, Paris. 512 pages.
  • Issa N. & Muller Y. (2015). Atlas des oiseaux en France Métropolitaine. Nidification et présence hivernale. LPO / SEOF / MNHN. Delachaux et Niestlé, Paris, 1408 p.
  • D. Goodwin (1986). Crows of the World (2nd edition). Natural History Museum Publications.
  • D. McFarland. (ed.) (1990). Dictionnaire du comportement animal. Robert Laffont.
  • L. Svensson, K. Mullarney, D. Zetterström (2015). Le guide ornitho, Delachault et Niestlé. 446 pages.
  • H. F. Witherby, (ed.) (1943). Handbook of British Birds, Volume 1: Crows to Firecrest. H. F. and G. Witherby Ltd.

Sites internet

Article de Pauline Smith