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L'espèce du mois
L'Ophrys abeille
Ophrys abeille, Ophrys apifera (Hudson, 1762). Famille des Orchidaceae.
Photo © Georges Jardin / Corif
Des sourcils aux abeilles
Les orchidées sont connues depuis longtemps, comme en témoigne le nom
scientifique de l'Ophrys abeille.
En effet, le genre Ophrys tire son nom du terme "ophrus" (sourcil), chez Pline l'Ancien :
une petite plante à deux feuilles dont on se servait pour teindre les sourcils et les cheveux.
Le nom d'espèce est, pour sa part, composé de deux mots :
"fera" signifiant "porteur" et "apis" qui renvoie aux abeilles.
Belle mais compliquée !
© Biotope
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Photo © Georges Jardin / Corif
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Il s'agit d'une plante vivace de 20 à 50 (70) cm de hauteur.
Ses feuilles inférieures sont plus ou moins étalées,
tandis que les supérieures sont plus dressées.
L'inflorescence est lâche, et ne comporte qu'un petit nombre de fleurs (5 à 15).
Les sépales sont généralement rose pourpre à blanchâtre,
souvent rabattus en arrière, ovales et lancéolés.
Les pétales sont velus, verdâtres et très petits.
Le labelle est faiblement convexe, trilobé (lobes peu marqués), bombé
et de petite taille (8 à 10 mm de longueur).
Les lobes latéraux forment des gibbosités aiguës et poilues
sur la face extérieure, mais glabres sur la face intérieure.
Le lobe médian est ovale arrondi, peu marqué,
à bords rabattus par-dessous et à dessin jaune blanchâtre.
Il arbore des tâches irrégulières et très variables,
comportant souvent un "U" en son centre.
L'appendice, triangulaire, est orienté vers l'arrière.
Le gynostème est long et sinueux.
Attention, l'espèce est très variable par les couleurs de la fleur, ainsi que la
forme des pétales et du labelle.
Vous voulez voir la star ?
en vert : présence actuelle ;
en rouge : présence avant 1980, non revue depuis
© Biotope
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Nul besoin d'aller à Cannes.
Il s'agit d'une plante euroméditéranéenne présente, au Nord,
jusqu'en Europe tempérée et, à l'Est, jusqu'au Caucase.
Elle se rencontre dans presque toute la France, Corse comprise.
Bien qu'elle n'ait pas été signalée dans la Creuse,
sa présence y est fort probable.
On la trouve dans toute les départements d'Ile-de-France,
mais elle semble moins présente dans le centre de la Seine-et-Marne
et dans le sud des Yvelines.
L'espèce est protégée en France
dans la Franche-Comté, le Limousin et le Nord-Pas-de-Calais.
Espèce de pleine lumière à mi-ombre, on la trouve dans les endroits herbeux
(jusque sur les pelouses même tondues), les garrigues, les bois clairs et les friches,
jusqu'à 1800 mètres d'altitude.
Elle a besoin d'un sol neutre à calcaire, sec à humide.
Commune et prolifique, elle est considérée comme pionnière.
Ce n'est pas une espèce menacée à court terme.
Néanmoins, elle peut décliner localement
par la fermeture d'un milieu ou la densification du couvert végétal.
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Tous les moyens sont bons pour se reproduire
Comme les autres Ophrys, l'Ophrys abeille utilise les services d'un insecte,
en l'occurrence d'un hyménoptère, pour assurer sa reproduction.
Elle l'attire au moyen de leurres visuel
(son labelle ressemble par la forme au corps de la femelle)
et olfactif (phéromone).
Le mâle (souvent un jeune) vient alors se poser sur la piste d'atterrissage que la plante lui offre.
A ce moment, des signaux tactiles se rajoutent aux signaux chimiques et visuels,
dus à la position, la taille et l'orientation de la pilosité du labelle.
Le mâle, au comble de l'excitation, tente alors de s'accoupler
avec ce qu'il croit être une partenaire : c'est la pseudocopulation.
Les mouvements désordonnés de l'insecte vont l'amener à heurter les pollinies
qui vont se coller à lui. Lorsqu'il finira par se lasser, il les emmènera avec lui,
et pour peu qu'il se fasse piéger à nouveau, déposera une partie de sa cargaison
dans une autre fleur.
Et si aucun insecte ne vient à passer par là,
pas de problème, parmi les ophrys,
c'est la seule espèce ayant régulièrement recours à l'autofécondation.
Les pollinies, dont les longs caudicules se dessèchent très rapidement
après l'ouverture de la fleur (quelques heures suffisent)
tombent sur le stigmate et viennent alors le féconder.
Cette autogamie entraîne fréquemment des anormalités de couleur, telles que la dépigmentation.
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Photo © Jean-Pierre Lair / Corif
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La Diva sait se faire attendre
L'Ophrys abeille est tenue, à tort, pour ne fleurir qu'une fois,
mourrant après avoir produit des graines.
En fait, elle aurait une longue durée de vie, mais une floraison irrégulière.
Ainsi, la population reste stable, tandis que la proportion d'individus
fleurissant chaque année peut subir d'importantes variations.
Si les feuilles sont visibles dès l'automne, il faut, en revanche, attendre
le mois d'avril et le plus souvent la mi-mai de l'année suivante
pour observer les premières fleurs.
Elles se laisseront ensuite admirer jusqu'en juillet.
Remerciements
Nous tenons à remercier toutes les personnes qui nous ont aidé dans la rédaction de cet article,
et notamment Georges Jardin qui nous a aimablement prêté plusieurs clichés
ainsi que la société d'études Biotope, qui nous a fourni de larges extraits
de son ouvrage traitant des orchidées sauvages d'Ile-de-France (Biotope pôle édition).
Pour en savoir plus...
DELFORGE P. (1994) - Guide des orchidées d'Europe, d'Afrique du Nord et du Proche-Orient. Delachaux et Niestlé. 481 p.
DUSAK F. et PERNOT P. (2001) - Les orchidées sauvages d'Ile-de-France.
Collection Parthénope. Biotope. 208 p.
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